Il paraît que Louis Armstrong répétait à qui voulait l’entendre que pour faire carrière dans le jazz, il fallait chanter. Sacha l’a compris...
Après une longue période noctambule passée à cumuler un job de directeur d'éditions le jour et un autre de brillant guitariste la nuit, Sacha songe à chanter. Les scoubidous vont faire de lui une vedette populaire en un été. Suivront une impressionnante liste de tubes acidulés puis, à l'âge et la maturité aidant, de vraies grandes chansons, bien pensées. Peu à peu, le chanteur playboy se transformera en ce qu'il va rester jusqu'au bout : le crooner français : Sacha Sunny Voice.
1958, Sacha, guitariste de jazz surdoué lorgne de plus en plus vers la chanson. Il enregistre sous le label Versailles un premier 45T sans réel succès. S’il veut prendre son envol, il faut un tube. Le premier : C’est l’Amérique qui va le lui offrir. Nous sommes en 58. Le 10 décembre, Sacha doit donner un de ses premiers concerts dans un Alger, déjà, en ébullition. Seulement voilà, le répertoire est un peu court. En visite à New York, il entend Nancy Holloway interpréter une chanson de Peggy Lee racontant sur fond jazzy l’histoire d’une fille vendant pommes, pêches et cerises. Déclic. Exit les deux derniers fruits, la version française mentionnera des pommes, certes, mais des poires et surtout, ce qui va devenir l’objet culte de la France des années soixante : les scoubidous ! A 25 ans, Sacha signe ainsi le premier d’une longue série de tubes.
4 ans après Bécaud, deux ans avant les yéyés, Sacha allait devenir la nouvelle coqueluche des Français, et surtout des Françaises. Ancré dans le paysage, Sacha va commencer sa carrière au rythme effréné de chansons populaires et parfois un peu facile au goût du jazzman esthète et cultivé qu’il était. Mais le temps jouera en sa faveur. La chance aussi, ça fait partie du jeu. Viendront alors des chansons plus ‘chic’ ; « Toute la pluie tombe sur moi », lui ouvrira les portes des chaumières anglaises. Mieux encore : « La belle vie » , standard planétaire, repris, entres autres par Tony Bennet et surtout Sinatra (l’idole), passera à la postérité.
Difficile à dire concrètement, mais il est évident que la dizaine de millions est dépassée. Comptez au total entre 100 et 150 singles et albums à son actif dont une trentaine en anglais, plusieurs en espagnol, en allemand, italien. L’Italie lui a offert deux disques d’or, l’Angleterre, plus de dix, et en France, pendant plus de trente ans, tous ses albums, sans exception, seront eux aussi recouverts du précieux métal.
Sacha fut d’abord un immense musicien. Puis un grand interprète. De ceux qui n’ont pas de barrière linguistique. Avec une voix telle qu’il n’est pas besoin de comprendre les paroles pour savoir qu’elles nous touchent. Un vrai chanteur quoi.
Eric Jean Jean